By Willy M. Amisi MD, MPH, PHD

Bien qu’elle abrite plus de 15 % de la population mondiale et porte environ un quart de la charge mondiale de morbidité, l’Afrique compte moins de 3 % des professionnels de santé du monde et à peine 1 % de la production mondiale de recherche1. De plus, la collaboration en matière de recherche entre les pays de l’Afrique subsaharienne est très faible : la Banque mondiale a démontré que la collaboration entre chercheurs se situe entre 0,9 % en Afrique de l’Ouest et centrale et 2,3 % en Afrique austral2

Les dépenses intérieures brutes en R&D (DIRD) en pourcentage du PIB de la RDC en 2017 s’élèvent à 0,41 % 3. La RDC a un ratio de chercheurs par million d’habitants inférieur à celui d’autres pays africains ayant une taille de population similaire ou comparable. De nombreux facteurs contribuent à la faiblesse des activités de recherche dans le pays, notamment le manque de  responsables de recherche adéquatement formés, des comités d’éthique de la recherche non structurés, les infrastructures de recherche inadéquates, le financement de la recherche sous-optimal, une dépendance excessive aux initiatives et financements de recherche étrangers, ainsi qu’un manque de collaboration avec d’autres centres de recherche basés en Afrique sur des programmes de recherche clés mutuellement bénéfiques.

Compte tenu de sa taille géographique et de sa population, la RDC dispose d’un immense potentiel de recherche susceptible de stimuler son développement socio-économique et d’améliorer considérablement la santé et le bien-être de sa population. Les programmes de recherche initiés et dirigés au niveau local qui se concentrent sur les problèmes et les défis nationaux ont un plus grand potentiel pour produire des résultats qui conduisent à des réformes politiques et juridiques appropriées pour stimuler des changements positifs dans la société.

Le point de départ devrait donc être l’identification de programmes de recherche sectoriels efficaces, axés sur les défis sociétaux. Dans le secteur de la santé publique en RDC, chaque domaine de ce spectre constitue un sujet de recherche. La santé maternelle et infantile, les maladies infectieuses et les épidémies, les maladies non transmissibles, les services de santé, les réformes du secteur de la santé, les ressources humaines pour la santé, etc. constituent une liste non exhaustive de domaines de santé publique largement sous-étudiés dans ce pays.

Au lendemain de la pandémie de Covid-19, la RDC dispose d’un potentiel croissant pour développer et étendre ses capacités de recherche en santé publique. La création de l’Institut national de santé publique en 2022 et le renforcement des capacités institutionnelles et opérationnelles en matière de préparation, de prévention et de contrôle des maladies aux niveaux provincial et national pendant la riposte à la COVID-19 constituent des acquis qui permettront au pays de bâtir une base solide pour intensifier la recherche en santé publique.

Le pays s’efforce également de renforcer l’environnement réglementaire dans les domaines de la bioéthique de la recherche, de la réglementation pharmaceutique, des essais cliniques et de la recherche biomédicale. Au niveau régional, le Centre africain de contrôle et de prévention des maladies (CDC Afrique), en collaboration avec le Forum des essais cliniques de l’OMS, a élaboré une feuille de route pour optimiser l’efficacité et l’impact de l’écosystème africain des essais cliniques4

Il existe cependant un besoin urgent de renforcer la gouvernance de la recherche en santé sur le continent en général et dans le pays en particulier afin de développer des politiques solides de recherche en santé, des plans stratégiques cohérents, une surveillance éthique efficace et de construire une infrastructure solide qui améliorera l’investissement du secteur privé et la commercialisation des résultats de la recherche. Il est également nécessaire d’élaborer et de mettre en œuvre des politiques publiques encourageant les investissements privés et l’aide internationale au développement pour soutenir les activités de recherche dans le pays. Cela aura un impact positif net sur le développement des infrastructures de recherche en santé publique, telles que les laboratoires, les centres d’essais cliniques et les équipements.

Le renforcement des capacités des chercheurs locaux, et notamment des jeunes scientifiques, doit figurer en tête des priorités du processus de renforcement des capacités de recherche. Les sujets de recherche doivent être adaptés aux priorités nationales et des efforts doivent être déployés pour décourager ce que l’on appelle la « science hélicoptère » ou les « études parachutistes », où des organisations étrangères collectent des données en Afrique, les analysent dans leur propre pays et publient leurs résultats avec peu, voire aucune, contribution de leurs homologues locaux.

La réglementation nationale de la recherche doit encourager la collaboration avec d’autres centres de recherche, principalement sur le continent africain, puis à travers le monde. Les recherches sur les questions concernant la RDC doivent être menées par des scientifiques congolais qui comprennent la culture, l’environnement, les traditions et les croyances des participants à la recherche.

Certains domaines de recherche en santé publique, tels que les essais cliniques menés sur des sujets locaux, peuvent améliorer la qualité des soins prodigués aux patients et leurs résultats cliniques. Par conséquent, les professionnels de santé locaux apportent non seulement leur connaissance des sujets de recherche aux études, mais ils apprennent aussi de précieux enseignements pouvant les aider à améliorer leur pratique et la prise en charge des patients

References

  1. Fonn S, Ayiro LP, Cotton P, Habib A, Mbithi PMF, Mtenje A, et al. Repositioning Africa in global knowledge production. Lancet. 2018;392:1163-6. 10.1016/S0140-6736(18)31068-7 [DOI] [PubMed] [Google Scholar]

  • World Bank. 2014. A decade of development in sub-Saharan African science, technology, engineering and mathematics research. Washington, DC: World Bank; 2014. [Google Scholar]

  • World Bank. Research and development expenditure (% of GDP). Washington DC: World Bank; 2017. [Google Scholar]

  • Africa Centres for Disease Control and Prevention

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